Techniques d'astronome amateur
Notions d

NOTIONS D'OPTIQUE

Le télescope photographique de Schmidt

Avant d'étudier cet instrument, considérons le télescope de la figure suivante.

Télescope à miroir sphérique
Figure 28 : Télescope à miroir sphérique.

L'objectif est un simple miroir sphérique complété par un diaphragme au niveau de son centre de courbure, c'est une ouverture qui limite la section utile du faisceau lumineux. Ceci lui confère des propriétés remarquables. Chaque point de l'image est formé par un faisceau dont l'axe passe par le centre de courbure "C" du miroir. Ce rayon central est aussi l'axe de révolution du système optique effectif pour ce point image. Ainsi disposé, cet objectif est donc débarrassé de la coma et de l'astigmatisme (B=0 et A=0).

Remarquons aussi la courbure du champ et la grande longueur du tube qui vaut le double de la distance focale.

Ce dispositif simple n'est pas adapté à l'observation visuelle. Il est parfois employé pour réaliser des photographies de grandes portions du ciel avec un miroir relativement peu ouvert pour limiter l'aberration de sphéricité (exemple : F/D=10). Pour cela, on applique un film ou une plaque photographique sur une surface courbe placée au foyer du miroir.

Les clichés obtenus sont inversés droite-gauche puisqu'il n'y a qu'une seule réflexion, il faut en tenir compte au tirage.

Pour éliminer l'aberration de sphéricité de ce télescope, Bernhard Schmidt a inventé une lame correctrice qu'il a insérée au niveau du diaphragme, c'est à dire au centre de courbure du miroir.

Bernhard Schmidt était un astronome estonien. Il est né le 11 avril 1879 à Naissaar (Estonie) et mort le 1er décembre 1935 à Hambourg (Allemagne). A 15 ans, il a accidentellement perdu son bras droit en cherchant à fabriquer une fusée. Malgré ce handicap, il a fabriqué un grand nombre d'instruments d'optique.

Le télescope de Schmidt
Figure 29 : Le télescope photographique de Schmidt. Le relief de la lame correctrice est exagéré sur cette illustration.
Cliquer sur l'image pour obtenir les caractéristiques détaillées d'un télescope de Schmidt.

Equipé de la lame de Schmidt qui corrige l'aberration de sphéricité du miroir, ce télescope peut être conçu avec une grande ouverture (F/D inférieur à 2). C'est l'instrument idéal pour la photographie (argentique) de grands champs stellaires.

Compte tenu de la disposition de la lame au centre de courbure du miroir, on peut dire que le tube de cet instrument est près de deux fois plus long que celui d'un télescope de Newton de même distance focale. Toutefois, cet aspect ne crée pas d'encombrement excessif car le télescope de Schmidt est généralement conçu avec une très courte distance focale.

Il est convenu de désigner les télescopes de Schmidt par la suite des trois dimensions caractéristiques en millimètres dans l'ordre suivant : diamètre de la lame / diamètre du miroir / longueur focale.
Exemple : Le télescope de Schmidt 200/250/400 a un rapport d'ouverture effectif F/D=2.

Le diamètre du champ de pleine lumière C est déterminé par la formule suivante :

     [37]

Avec : D = diamètre du miroir
           L = diamètre de la lame de Schmidt

Intéressons-nous maintenant à la forme de la lame de Schmidt. Celle-ci doit corriger l'aberration de sphéricité du miroir sphérique et nous avons vu plus haut (Figure 18) que les rayons marginaux de celui-ci convergent plus vite que ses rayons centraux. A partir de cette constatation, on déduit que la lame correctrice doit présenter une divergence sur les bords afin de reculer le foyer des rayons périphériques.

Un premier raisonnement, nous conduirait à imaginer une lentille divergente dont la méridienne serait parabolique. Elle présenterait une puissance nulle au centre et une divergence qui irait en croissant du centre vers le bord. Le télescope ainsi équipé verrait converger les rayons marginaux précisément au foyer des rayons centraux. Ainsi notre but semblerait être atteint mais une analyse plus détaillée nous montre que cette lentille introduirait une aberration chromatique sensible sur les instruments très ouverts. C'est pour cela que Bernhard Schmidt a utilisé une silhouette optimisée pour la lame de fermeture de son télescope.

La lame de Schmidt présente une convergence dans sa partie centrale et une divergence dans sa partie périphérique, la distance focale résultante du télescope est donc légèrement raccourcie, elle devient un peu inférieure à R/2.

On peut concevoir une infinité de méridiennes différentes pour cette lame de fermeture décrites par la formule suivante en faisant varier le paramètre de focalisation "k".

     [38]

Avec : L = diamètre de la lame de Schmidt
           ρ = 2r/L = hauteur d'incidence réduite
           r = hauteur d'incidence (= distance à l'axe au niveau de la lame)
           m = R/2L = rapport d'ouverture F/D
           k = paramètre de focalisation compris entre 0 et 2

Toutefois, c'est le profil de Kerber qui provoque le plus faible chromatisme sur l'image, il correspond à k=1,5. La règle de Kerber indique que le profil de la méridienne de la lame doit présenter un point d'inflexion à la hauteur d'incidence (= distance à l'axe) Hn :

     [39]

Il faut bien noter que la formule [38] est une approximation. Ainsi, un télescope de Schmidt 200/250/400 équipé d'une lame formée précisément selon le profil défini par cette relation aurait une aberration de sphéricité résiduelle et fournirait des images d'étoiles dont le diamètre serait à peine inférieur à 20 µm. Pour être plus précis, il faut tenir compte de coefficients de degrés plus élevés.

Avec cette méridienne de Kerber, les aberrations chromatiques sont maximales pour ρ=1/2 et pour ρ=1 et les déviations qui correspondent à ces zones sont égales et opposées.

Demi-profil de la lame de Schmidt pour différentes valeurs de k
Figure 30 : Demi-profil de la lame de Schmidt pour différentes valeurs de k.

La figure [30] montre différents profils de lames de Schmidt. Nous constatons que le profil pour k=1,5 ne correspond pas au relief le plus faible pourtant c'est bien lui qui fournit l'aberration chromatique minimale.

Profil d'une lame de Schmidt avec méridienne de Kerber
Figure 31 : Profil d'une lame de Schmidt avec méridienne de Kerber.

Le relief sur le profil de la lame de Schmidt illustrée sur les schémas est fortement exagéré. En effet, prenons pour exemple un télescope de Schmidt 200/250/400, la formule [38] nous apprend que la lame de Kerber de cet instrument ouvert à F/D=2 présente des variations d'épaisseur dont la valeur maximale est inférieure à 53µm. C'est si faible qu'elle semblerait être une lame à faces planes et parallèles à un œil non expérimenté. Cette valeur est comparable aux défauts d'épaisseur d'une vitre ordinaire.

Le plus souvent la lame de Schmidt est plane sur son autre face mais l'opticien répartit parfois l'usinage sur les deux faces du disque de verre. Chaque face est alors mise en forme avec un relief correspondant à la moitié de l'amplitude de la méridienne de Kerber. L'efficacité est identique du point de vue de l'optique mais des contraintes de fabrication peuvent orienter le constructeur vers cette solution particulière.

La lame de Schmidt doit être placée au centre de courbure du miroir. La position exacte dépend du choix de la face qui est déformée. Si la lame est trop près du miroir on constate une coma positive et si elle est trop éloignée la coma est négative.

Le télescope de Schmidt est corrigé de l'aberration de sphéricité, de la coma, de l'astigmatisme et de la distorsion. Il reste une faible aberration chromatique et une courbure du champ.

La lumière doit traverser cette lame de Schmidt et ceci limite donc le domaine spectral explorable avec ce télescope. C'est pour cela que la lame correctrice de certains télescopes de Schmidt est constituée d'un verre spécial. Exemple : une lame en quartz pour sa transparence aux rayonnements ultraviolets.

Cet instrument est (était?) exclusivement destiné à la photographie argentique. On l'appelle parfois "Chambre photographique de Schmidt". Grâce aux grandes dimensions du champ de ses photographies, les astronomes ont patiemment cartographié le ciel, ils ont découvert de nombreuses comètes et de très nombreux astéroïdes, ils ont étudié beaucoup de nébuleuses qu'ils n'auraient pas pu observer avec d'autres instruments... mais depuis le début des années 2000, il n'est plus possible de se procurer des plaques ou des films photographiques qui lui sont adaptés. Ceci semble condamner son avenir. Aujourd'hui, les capteurs électroniques succèdent à la plaque photographique avec toutefois quelques limitations : On ne peut pas courber leur surface et ces nouveaux dispositifs ont des dimensions beaucoup plus limitées (quelques centimètres). Ils ne peuvent donc pas bénéficier des avantages particuliers du télescope de Schmidt. Certaines expérimentations sont parfois tentées en regroupant plusieurs capteurs côte à côte et en redressant la courbure du champ avec des lentilles disposées avant le foyer. Les résultats n'ont pas encore été assez convaincants pour relancer l'essor de cette formule optique.

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